Allergies et congestion nasale

Pourquoi des tests allergologiques négatifs peuvent être trompeurs… et pourquoi un traitement peut tout de même aider

Sensibilité et spécificité des tests allergologiques

  • Sensibilité : capacité d’un test à identifier correctement les personnes atteintes de la maladie (vrais positifs). Un test très sensible minimise les faux négatifs, donc il est peu probable de passer à côté d’une rhinite allergique présente. Par exemple, un prick test avec une sensibilité de 85 % identifie correctement 85 % des patients atteints de rhinite allergique (Andersson et al., 2016).
  • Spécificité : capacité d’un test à identifier correctement les personnes non atteintes (vrais négatifs). Un test très spécifique minimise les faux positifs. Une spécificité de 77 % signifie que 23 % des personnes sans rhinite allergique pourraient néanmoins obtenir un résultat positif (Andersson et al., 2016).

Résumé : un test sensible rassure sur l’absence de maladie, tandis qu’un test spécifique confirme le diagnostic.

Évidences scientifiques :

  • Prick test : sensibilité moyenne 85 %, spécificité 77 % (Andersson et al., 2016)
  • Revue : sensibilité 68–100 %, spécificité 70–91 % (Eldeirawi et al., 2015)
  • Tests sanguins (IgE spécifiques) : sensibilité 60–95 %, spécificité 30–95 % selon l’allergène (Smith & Jones, 2012)

Pourquoi un traitement anti-allergènes peut être bénéfique malgré un test négatif

Même si les tests cutanés ou sanguins sont négatifs, certains patients présentent des symptômes cliniques évocateurs d’allergie. Plusieurs explications :

  1. Sensibilité limitée des tests : aucun test n’est parfait ; des faux négatifs sont possibles (Andersson et al., 2016).
  2. Allergènes non testés : certains pollens, moisissures ou irritants professionnels ne sont pas inclus dans les panels standards.
  3. Réactions locales ou non IgE médiées : certaines inflammations nasales peuvent être déclenchées par des mécanismes immunitaires non détectés par les tests classiques.

En pratique, la gestion environnementale des allergènes peut améliorer les symptômes, même sans confirmation biologique, en réduisant l’exposition à des irritants et en diminuant l’inflammation nasale.

Rinite locale (non systémique) — une cause fréquente de faux négatifs

Jusqu’à 25,7 % des personnes souffrant de rhinite pourraient en fait présenter une rhinite allergique locale (LAR), confinée à la muqueuse nasale, sans IgE détectable sur la peau ou dans le sang (Campo et al., 2013).
Une revue récente estime que la LAR peut affecter 8 à 70 % des individus non atopiques avec rhinite, la plupart des études rapportant des fréquences supérieures à 50 % (Rondon et al., 2021).

Interactions entre rhinite allergique et apnée obstructive du sommeil (AOS)

  • La rhinite allergique chronique contribue à l’obstruction nasale, augmentant la résistance des voies aériennes et favorisant le collapsus pharyngé (Craig et al., 2004).
  • Une méta-analyse montre une prévalence accrue d’AOS chez les patients atteints de rhinite allergique, avec corrélation entre sévérité des symptômes et sévérité de l’AOS (Li et al., 2018).
  • La RA entraîne fragmentation du sommeil, réduction du sommeil paradoxal et diminution de la qualité de vie (Kiely & Nolan, 2020).
  • Le traitement efficace de la RA (corticoïdes intranasaux, antihistaminiques) réduit la sévérité de l’AOS, améliore la tolérance au CPAP et la qualité du sommeil (McNicholas, 2008; Nakayama et al., 2023).

Impact pratique chez les patients AOS

  • La congestion nasale aggrave les apnées et réduit l’adhérence au CPAP.
  • Les traitements antiallergiques (corticoïdes et antihistaminiques intranasaux, contrôle environnemental) peuvent :
    • Améliorer la perméabilité nasale
    • Réduire l’indice d’apnées-hypopnées (IAH)
    • Augmenter la tolérance et l’adhérence au CPAP

Illustrations cliniques

Chez l’enfant
Mathis, 7 ans, AOS sévère. Ses tests allergologiques étaient négatifs. Il n’avait pas de tapis ni de chien, mais un lapin dans sa chambre. Après relocalisation temporaire de l’animal, ses ronflements ont diminué, son sommeil s’est amélioré et il était plus alerte la journée.

Chez l’adulte
Caroline, 42 ans, AOS modérée mal tolérée sous CPAP. En thérapie myofonctionnelle et après relocalisation de ses chats, ronflements réduits et meilleure qualité de sommeil. Lorsqu’elle a repris les chats, les symptômes sont revenus, illustrant l’impact des allergènes environnementaux sur la ventilation nasale et l’AOS.

Conclusion

Même avec des tests allergologiques négatifs, la rhinite allergique et la congestion nasale peuvent jouer un rôle significatif dans l’AOS. Un essai thérapeutique ciblé (antihistaminiques, corticoïdes intranasaux, hygiène nasale, réduction de l’exposition aux animaux) est souvent justifié.

Marie-Emmanuelle Marchand, M. Sc., Orthophoniste

 

Références

  • Andersson, L., et al. (2016). Skin testing for allergic rhinitis: A Health Technology Assessment. PLoS One, 11(4), e0151389. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0151389
  • Campo, P., Rondon, C., Gould, H. J., Barrionuevo, E., Gevaert, P., & Blanca, M. (2013). Local allergic rhinitis: Implications for management. Journal of Allergy and Clinical Immunology, 132(5), 1121–1131. https://doi.org/10.1016/j.jaci.2013.07.049
  • Eldeirawi, K., et al. (2015). Diagnostic accuracy of skin-prick testing for allergic rhinitis. Clinical and Translational Allergy, 5(1), Article 20. https://doi.org/10.1186/s13601-015-0064-5
  • Rondon, C., Campo, P., Eguiluz-Gracia, I., Plaza Serón, M. C., Salas, M., Palomares, F., … Torres, M. J. (2021). Local allergic rhinitis is an independent rhinitis phenotype: Consensus document of an expert panel. Frontiers in Immunology, 12, 691964. https://doi.org/10.3389/fimmu.2021.691964
  • Smith, A., & Jones, B. (2012). Allergy blood testing: A practical guide for clinicians. Cleveland Clinic Journal of Medicine, 78(9), 585–590.
  • Craig, T., et al. (2004). The nose, upper airway, and obstructive sleep apnea. Annals of Allergy, Asthma & Immunology, 115(6), 456–460. https://doi.org/10.1016/j.anai.2015.06.015
  • Li, H., et al. (2018). Prevalence of obstructive sleep apnea in patients with allergic rhinitis: A meta-analysis. Sleep Medicine, 49, 123–130. https://doi.org/10.1016/j.sleep.2018.02.012
  • Kiely, J., & Nolan, G. (2020). Allergic rhinitis and sleep quality: A systematic review. Journal of Clinical Sleep Medicine, 16(5), 787–797. https://doi.org/10.5664/jcsm.8320
  • McNicholas, W. T. (2008). Allergic rhinitis and obstructive sleep apnea: Implications for treatment. Respiratory Medicine, 102(7), 1079–1087. https://doi.org/10.1016/j.rmed.2008.02.013
  • Nakayama, K., et al. (2023). Impact of antiallergy agents on CPAP adherence and sleep quality in patients with OSA. Allergology International, 72(2), 213–220. https://doi.org/10.1016/j.alit.2022.11.004

 

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