Langage et discipline – Comment obtenir la collaboration d’un enfant

Je suis orthophoniste. Je ne prétends pas être autre chose. Cela dit, les consignes qu’on donne et les questions qu’on pose c’est du langage. Savoir comment les donner pour favoriser la compréhension et la collaboration d’un enfant, c’est donc de mon domaine.

Dans mon rôle de maman, j’en échappe. Lorsque je me rappelle ces stratégies, cependant, je vois immédiatement le changement s’opérer. C’est ce qui m’a inspiré ce billet. Je me suis dit l’autre jour que je serais mal prise si j’ignorais comment rectifier le tir. J’ai donc pensé que ça pouvait être utile. Si vous le souhaitez, je vous invite à me suivre dans ce petit guide pratique et à mettre ces stratégies au test. Je serai ravie de lire vos commentaires !

 

Les conditions : Évitez les si du type. Si tu termines tes brocolis tu auras du dessert. C’est une phrase au conditionnel et plutôt difficile à comprendre de par sa structure (condition puis conséquence). C’est sans compter que vous lui enseignez à marchander. Il va l’apprendre et vous serez pris avec le problème ensuite.

Privilégiez plutôt la temporalité. Quand tu auras terminé tes brocolis, tu auras du dessert. Dis comme ça, ça ne laisse pas le choix à l’enfant et ça lui indique clairement, sans charge émotive, ce qui viendra ensuite. De plus, c’est une phrase affirmative et positive et donc facile à comprendre, même des tout-petits.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Obtenir la participation d’un enfant en éliminant les interférences langagières.

Les questions à choix ne sont pas toujours comprises. Souvent, l’enfant répondra par le dernier choix, parce qu’il ignore ce qu’on attend de lui et essaie de se complier. Mettez donc le choix que vous croyez qu’il va privilégier au début. Par exemple, Veux-tu du jus ou de l’eau ? Ça forcera l’enfant à réfléchir à la structure de votre question, s’arrêter et nommer son choix véritable. À la longue, ça donne un enfant qui comprend mieux. S’il comprend ce qui est attendu de lui, il a plus de chance de bien y répondre.

Les phrases négatives. Voici un autre type de phrase où l’enfant ne saisit pas tout. Quand vous dites : Ne colore pas sur la table !, lui n’a pas saisit l’ajout des marques de négation ne et pas. Il entend :  Colore sur la table. Aussi, il ne comprendra pas votre irritation lorsqu’il continuera. Plutôt, utilisez des phrases affirmatives. Par exemple, Colore sur la feuille mon chaton. Sur la feuille là. C’est ça, bravo ! C’est positif et bon pour votre relation, mais aussi, ça respecte le développement morphosyntaxique réceptif (phrases comprises) de votre enfant.

Donnez-lui le contrôle : Rappelez-vous une seconde comment il était frustrant de ne rien pouvoir décider lorsque nous étions enfant. Donnez-lui des choix. Par exemple, si vous souhaitez qu’il s’habille. Ne lui demandez pas : Veux-tu t’habiller ?, parce que ça lui donne l’opportunité de vous répondre non. Vous insisterez et ça lui apprendra que quand vous lui posez une question, vous n’allez pas vraiment tenir compte de son point de vue. Il apprendra que vous n’êtes pas partenaires de communication à part entière. Plutôt, donnez-lui le contrôle. Par exemple, On mets les bottes ou le manteau en premier ? C’est moi ou toi qui brosse tes dents aujourd’hui ? Formulé ainsi, il n’a d’autre choix que de participer, il se sent considéré et ça encourage plus d’échanges communicationnels véritables entre vous.

Donnez-lui du temps : S’il n’obtempère pas immédiatement, comptez jusqu’à 7 dans votre tête puis répétez calmement. L’enfant a besoin de plus de temps que l’adulte pour comprendre les questions et les consignes, mais également pour préparer sa réponse et formuler sa pensée. Lui laisser le temps plutôt que de le bombarder à nouveau de mots qu’il lui faut déchifrer lui donne une chance de répondre à votre requête de manière positive et dans un climat calme.

Donnez-lui les mots : Un enfant qui tappe, qui mord, qui crie, c’est un enfant qui n’a pas les mots pour s’exprimer. Je l’ai expérimenté nombre de fois. Un enfant agité à qui on montre des images illustrant des émotions se calme dès qu’il a trouvé celle(s) qui correspondent à son ressenti. Ce n’est pas différent de nous. Dès qu’on identifie pourquoi on se sent tout croche, on va mieux. Ah, oui, tantôt le monsieur… je ne me suis pas sentie respectée. La grande différence c’est que les enfants n’ont pas le vocable pour nommer dans leur tête ou à voix haute comment ils se sentent.

Pour ce faire, j’aime bien utiliser les cartes de Bougribouillon. Je les ai plastifiées et je les garde pas loin. Je réutilise aussi ces cartes pour identifier dans des livres les sentiments des différents personnages, ça aide à développer le lexique des émotions sans impliquer l’enfant directement. C’est moins menaçant. À pratiquer sans modération.

12 cartes des émotions (numériques) – Boutique Bougribouillons

Voilà pour aujourd’hui. J’espère avoir aidé, ne serait-ce qu’un peu. Laissez-moi des commentaires, je serai ravie de vous lire.

Votre orthophoniste de proximité,

Marie-Emmanuelle Marchand, M. Sc., Orlthophoniste

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