Trouble du spectre de l’autisme et langage

Un brin de définition

Le trouble du spectre de l’autisme ou TSA, tel que défini par le DSM-V (Manuel diagnostic utilisé par les médecins, les psychiatres et les psychologues) est un déficit persistant de la communication et des interactions sociales avec des comportements répétitifs et des intérêts restreints et dont les manifestations apparaissent généralement à la petite enfance, mais peuvent passer inaperçus jusqu’à ce que les exigences de l’environnement social dépassent les capacités de la personne à y répondre.

En orthophonie, la communication, c’est notre domaine. Alors, du point de vue langage, à quoi pouvons-nous nous attendre chez cette clientèle? Cette question n’est pas évidente, et pour y voir plus clair, j’ai résumé ici ce qui me semble le principal.

Verbal ou non verbal?

D’abord, il faut savoir que le TSA peut être défini comme verbal ou non verbal. De fait certains enfants sont dits non verbaux, c.-à-d. qu’ils ne parlent pas ou alors très peu. Pour ces derniers, le terme non verbal ne reste généralement pas au-delà de 10 ans. Une étude longitudinale récente (Lord, Risi, & Pickles, 2004) tend en effet à démontrer que même les jeunes enfants non verbaux développent un certain niveau de langage vers 8-9 ans.

Cela dit, l’objectif de ce billet est de dresser le profil langagier typique des enfants ayant un TSA, donc je me concentrerai sur les verbaux à partir de ce point.

TSA avec ou sans trouble du langage, là est la question!

Les chercheurs ne s’entendent pas sur la comorbidité (coexistence de deux ou plus diagnostiques) du TSA et du trouble du langage. D’un côté, certains croient que le TSA peut se présenter avec ou sans trouble du langage, selon les enfants. De l’autre, on croit plutôt que les atteintes langagières font partie des manifestations du TSA et donc, qu’elles ne sont pas attribuables à un trouble supplémentaire comme le serait le trouble du langage dans ce cas.

Le principal quant à moi consiste à ne pas perdre de vue notre rôle auprès de ces enfants, adolescents, adultes qui doivent composer avec les interactions sociales, les codes linguistiques et les rapports verbaux du quotidien. Ainsi, j’opterais pour décrire les atteintes et leur impact fonctionnel pour favoriser une meilleure adaptabilité, fonctionnalité.

Voici donc un résumé du portrait langagier «attendu». J’ai mis ce terme entre guillemets, parce qu’il importe de garder en tête qu’il y a une grande hétérogénéité c.-à-d. que tous sommes uniques, et il en va de même pour cette clientèle. Notez que la majorité des éléments rapportés ici-bas proviennent du livre Language Disorders – from infancy through adolescence 4th edition de Paul & Norbury 2012

Profil langagier
Phonologie

–        L’articulation des sons de la langue est généralement épargnée quoique des variantes dans le rythme, la prosodie et l’intonation sont notées chez les adultes.

Lexique + Sémantique

–        Ils ont parfois moins de vocabulaire que leurs pairs, mais c’est surtout la sémantique qui diffère. La sémantique est le réseau de sens derrière le mot. Ainsi, ils pourront posséder un mot, mais en fournir une définition différente de son sens habituel.

Morphologie + Syntaxe

–        La morphologie peut se résumer à la grammaire parlée et la syntaxe à la structure des phrases. Ainsi, il a été observé qu’ils utilisaient des temps de verbe et des structures de phrases plus simples (selon des études anglophones) que leurs pairs.

Discours + Pragmatique

–        La pragmatique, c’est l’utilisation du langage. C’est de regarder l’autre, ne pas lui couper la parole mais c’est aussi de comprendre que nous ne connaissons pas la tante dont vous parlez et donc que vous devez nous dire de qui il s’agit. La pragmatique est donc nécessaire pour se mettre à la place de l’autre, inférer sur ses sentiments et s’ajuster au contexte et à l’interlocuteur. En compréhension de texte, la pragmatique est nécessaire pour comprendre les sentiments et intentions du personnage et supporter les inférences relatives à l’histoire ex.: La petite fille s’oppose à son père parce qu’elle est en colère contre lui pour avoir changé d’idée concernant la sortie initialement prévue.

–        Les personnes qui ont un TSA prendront généralement moins d’initiative langagière, mais elles peuvent aussi trop engager la conversation et ainsi louper les indices non verbaux de la personne et mal saisir ce qui est attendu d’elles dans ce contexte précis. Elles peuvent aussi parler d’évènements non pertinents dans le détail, répondre à une question de manière inappropriée pour le contexte, faire des blagues dépourvues de sens. D’ailleurs, les blagues, les métaphores et les expressions exigent de comprendre un deuxième sens, souvent figuré et les personnes qui ont un TSA ont beaucoup de mal à saisir ces particularités langagières. Les blagues tombent donc souvent à plat. Mais quand on y pense, il pleut des cordes ça n’a guère plus de sens qu’il pleut des hamburgers (film d’animation de Sony)!

J’espère vous avoir informé(e)s, et à défaut au moins fait sourire.

Pour en savoir plus ou pour consultation, n’hésitez pas à m’appeler.

Marie-Emmanuelle Marchand, M. Sc., orthophoniste

 

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