Pourquoi ronfler peut rendre le mouchage moins efficace

Ronflements et efficacité du mouchage : un lien souvent sous-estimé

Le ronflement n’est pas qu’une nuisance sonore nocturne. Il peut être le témoin d’un dysfonctionnement plus profond de la musculature oropharyngée, avec des répercussions fonctionnelles au quotidien – y compris sur un geste aussi banal que le mouchage.

Le rôle clé du voile du palais dans le mouchage

Lorsqu’une personne se mouche, le voile du palais (ou palais mou) joue un rôle de régulateur. Pour permettre l’évacuation efficace des sécrétions nasales, ce muscle doit s’élever et s’ouvrir correctement afin de diriger le flux d’air expiratoire du pharynx vers les fosses nasales. En d’autres termes, il agit comme une valve musculaire contrôlant le passage de l’air entre les cavités orales et nasales.

Cependant, même si le voile est structurellement ouvert, l’efficacité du mouchage dépend en partie de la tonicité musculaire de cette région. Une musculature affaiblie – souvent observée chez les personnes ronflant de manière chronique ou présentant une apnée obstructive du sommeil (AOS) – peut compromettre l’ouverture complète ou la stabilité du voile pendant l’effort d’expulsion.

Ronflements et hypotonie vélopharyngée

Chez les ronfleurs, une hypotonie du voile du palais est fréquemment observée. Cette faiblesse musculaire favorise non seulement les vibrations nocturnes caractéristiques du ronflement, mais nuit également à la coordination des gestes oro-pharyngés, dont le mouchage.

Une valve vélo-pharyngée peu tonique peut ainsi entraîner une ouverture partielle ou instable au moment du mouchage, réduisant la pression expiratoire nasale. Résultat : l’évacuation des sécrétions devient moins efficace, ce qui compromet le drainage optimal des voies respiratoires supérieures.

Facteurs anatomiques aggravants chez les ronfleurs

Plusieurs caractéristiques anatomiques ou inflammatoires fréquemment observées chez les ronfleurs peuvent également compliquer le dégagement nasal :

  • Rhinite allergique et hyperplasie des cornets nasaux : les cornets sont des structures osseuses recouvertes de muqueuse à l’intérieur des fosses nasales. Lorsqu’ils sont hypertrophiés (augmentation de volume, souvent liée à l’inflammation chronique), ils réduisent l’espace disponible pour le passage de l’air et des sécrétions, rendant le mouchage plus difficile.

  • Hypomaxillie : une mâchoire supérieure étroite (hypodéveloppement maxillaire) est fréquemment retrouvée chez les ronfleurs. Le palais dur, qui constitue le « plafond » de la bouche, est aussi le plancher des fosses nasales. En cas d’hypomaxillie, le palais est souvent haut et étroit, ce qui réduit le volume nasal disponible et rend l’évacuation des sécrétions plus laborieuse.

  • Ventilation buccale et déshydratation : la respiration par la bouche, fréquente chez les ronfleurs, favorise la déshydratation des muqueuses. Cela entraîne un épaississement des sécrétions nasales, qui deviennent plus visqueuses et donc plus difficiles à mobiliser lors du mouchage.

Conséquences cliniques

Un mouchage inefficace peut aggraver les symptômes nasaux (congestion, pression sinusale, toux réflexe) et contribuer à la stase des sécrétions, à l’inflammation chronique et à l’augmentation du risque infectieux. Dans un contexte de ronflement ou d’AOS, ces facteurs locaux peuvent entretenir un cercle vicieux respiratoire et inflammatoire.

En pratique clinique

Il est pertinent, dans l’évaluation orthophonique de patients présentant des ronflements, une AOS ou des troubles de la ventilation nasale, d’examiner non seulement la fonction vélopharyngée mais aussi les caractéristiques anatomiques du massif facial, la qualité des sécrétions et les habitudes respiratoires. Une rééducation oro-myo-fonctionnelle ciblée peut contribuer à améliorer à la fois le tonus musculaire et l’efficacité du dégagement nasal, en complément d’une prise en charge médicale adaptée le cas échéant.


Conclusion
La force des muscles du voile du palais, la qualité de l’architecture nasale et l’hydratation des muqueuses sont autant de facteurs qui influencent l’efficacité du mouchage. Chez les ronfleurs, ces éléments doivent être pris en compte dans une approche globale, intégrant à la fois les dimensions fonctionnelles et anatomiques des voies respiratoires supérieures.

Étonnant n’est-ce pas?

Marie-Emmanuelle Marchand, M. Sc., Orthophoniste

Partager cet article :

INSCRIVEZ-VOUS À L’INFOLETTRE POUR NE PAS LA MANQUER!

No Comments

Leave a Reply

Derniers articles

Ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience de navigation et garantir le bon fonctionnement du site. En continuant à utiliser ce site, vous reconnaissez et acceptez l'utilisation de cookies.

Accepter tout Accepter uniquement les requis