Mai – Mois de sensibilisation au Trouble de l’alimentation pédiatrique

Description du problème

Ce trouble touche 1/37 enfants, ce qui en fait un trouble plus fréquent que l’autisme ou la paralysie cérébrale… mais bien plus inconnu.

Ce que ça veut dire, c’est que pour des milliers d’enfants et de parents, la période des repas est un combat, un lieu empli de peurs et de relents de traumas. Vous seriez sur vos gardes vous aussi si votre enfant s’étouffait au point de virer bleu de manière récurrente ou s’il se cabrait de douleur au moment d’avaler.

Voici certaines des caractéristiques du trouble de l’alimentation pédiatrique:

  • Sélectivité alimentaire extrême : basée sur la texture, la couleur et le goût
  • Refus alimentaire : bâillonnement, vomissements, coups, pleurs
  • Appétit limité
  • Mauvais poids ou incapacité à prendre du poids
  • Compétences alimentaires retardées ou dysfonctionnelles
  • Comportement perturbateur au moment des repas
  • Mange différemment dans différents environnements
  • Impact négatif sur le fonctionnement de la famille

Si c’est le cas de votre enfant, ou d’un enfant que vous connaissez, nommez votre inquiétude. Il y a généralement une raison sous-jacente et contrairement à la croyance populaire, ça ne s’atténue pas toujours avec l’âge. Parlez à votre pédiatre.

Pourquoi ça me touche?

Je suis orthophoniste en privé. Le trouble d’alimentation pédiatrique, ne devrait pas faire partie de ma clientèle et pourtant c’est le cas. Les parents attendent souvent des mois avant d’avoir des services des équipes spécialisées et dans l’intervalle, j’essaie d’aider. Pour d’autres, ils ne savent simplement pas ce qui se passe avec leur enfant. Alors ils consultent et c’est tant mieux! Je suis heureuse de pouvoir aider en nommant les choses, en écoutant leurs peurs et leurs besoins, en faisant des recommandations pour sécuriser l’alimentation des petits. En observant ce qui se passe, on peut souvent faire des hypothèses qui tiennent la route et aider.

J’ai vécu ce genre de rencontre hier. Des parents stressés, que j’ai vu rapidement. Un enfant qui a du mal à s’alimenter, ça passe devant tous les autres dans ma liste des priorités. Ils sont repartis avec un oufff dans la voix, une souplesse dans le pas. Ils étaient moins stressés, certainement mieux informés et outillés pour essayer différentes approches avec leur coco de 7 mois à peine.

Je me suis formée en dysphagie pédiatrique (appellation qui regroupait autrefois les troubles organiques liés à l’alimentation pédiatrique), parce que j’en croisais dans ma pratique et souhaitais comprendre et intervenir à mon niveau. Sécuriser là où je pouvais en m’assurant de garder le médecin dans la loupe et de référer au public lorsque ce n’est pas déjà fait.

Diagnostic différentiel

Pediatric feeding disorder (PFD) et l’Avoidant restrictive food intake disorder (ARFID)

En français Trouble de l’alimentation pédiatrique et Trouble d’alimentation sélective/évitant

L’ARFID a été généré en tant que diagnostic de santé mentale pour décrire les enfants ayant des problèmes d’alimentation et un risque ou une carence nutritionnels associés sans problèmes d’image corporelle coïncidents, comme on le voit dans l’anorexie.

Le PFD est un diagnostic multidisciplinaire (l’orthophoniste participe, mais n’est pas seule dans la décision) qui inclut le dysfonctionnement de l’alimentation dans un ou plusieurs des quatre domaines, médical (ex. : fait des fausses-routes et développe des bronchites et des pneumonies), nutritionnel (ex. : est sous le poids attendu pour l’âge), de compétence alimentaire (ex. : a de la difficulté à déchiqueter la viande et autres textures fibreuses) ou psychosocial (ex. : préfère manger des collations seul durant la journée qu’à la table avec les autres membres de la famille).

Si la cause des difficultés d’alimentation inclue un dysfonctionnement médical ou une cause organique (ex. : oesophagite – inflammation de l’œsophage, généralement en lien avec du reflux et des intolérances alimentaires qui rend le passage des aliments douloureux, voire impossible), on parlera de Trouble de l’alimentation pédiatrique. Si c’est purement comportementale, de Trouble d’alimentation sélective/évitant. Là où ce n’est pas évident, c’est que la cause organique n’est pas simple ou rapide à identifier bien souvent et que le comportemental est également présent dans le Trouble de l’alimentation pédiatrique, mais secondaire. Si je reprends mon exemple d’oesophagite, l’enfant se câbre de douleur, recrache, vomit, refuse de s’alimenter et on le comprend. Ce qui est organique devient comportemental.

 

Et quand c’est plus léger? Un enfant difficile à table, par exemple?

Picky eaters – enfants sélectifs ou difficiles à table

Dans ma pratique myofonctionnelle, il n’est pas rare que je croise des enfants que les parents décrivent comme sélectifs. Souvent ils vont dire des choses comme Ah, lui, c’est notre petit végétarien! Il n’aime pas la viande. Ça me met toujours sur la piste de la mastication. Les enfants qui ont une déglutition infantile (avale en poussant la langue vers l’avant) vont souvent avoir une mastication infantile également (broyage plutôt que déchiquetage). Pour eux, donc, mastiquer les aliments fibreux comme de la viande est ardu, voire impossible. Ils délaissent donc cette texture et en privilégie d’autres qu’ils peuvent avaler sans efforts, et au premier rang, nous avons … les pâtes!

La dernière fois que j’ai posé cette question, l’enfant de 8 ans me répond : les cannelonis, le macaroni au fromage, les pâtes, la purée de pommes de terre et le spaghetti! Je vous jure! Hihihi Il n’avait même pas réalisé (et son parent non plus), avant que je le souligne, que ce n’est que du mou (et que ce sont presque toutes des pâtes!).

Si vous êtes orthophoniste myofonctionnelle:

-1- demandez à vos clients ce qu’ils préfèrent manger, vous pourrez en tirer des conclusions intéressantes. La dernière fois que j’ai posé cette question, l’enfant de 8 ans me répond : les cannelonis, le macaroni au fromage, les pâtes, la purée de pommes de terre et le spaghetti! Je vous jure! Hihihi Il n’avait même pas réalisé (et son parent non plus), avant que je le souligne, que ce n’est que du mou (et que ce sont presque toutes des pâtes!).

-2- et que vous ne savez pas trop comment on rééduque la mastication, ni quelle différence il y a entre broyage et déchiquetage, que vous vous concentrez que sur la déglutition, eh bien, un morceau vous a échappé toutes ces années. Et s’en est un génial, parce qu’il a tant de ramifications (ex. : bruxisme, dysfonction de l’articulation temporo-mandibulaire, céphalées et migraines…). Ah, si seulement je donnais du mentorat… hihi mais oui! Prise de r.v. sur mon site. Tout simplement.

Si vous êtes un parent et que vous aimeriez bien des pistes de solution, voici des idées simples:

  • Établissez une routine de repas. Heures et places fixes. Les enfants trouvent du réconfort et de la confiance dans une routine prévisible.
  • Établissez des limites aimantes et appropriées. Je ne m’attends pas à ce qu’un tout-petit reste assis à table pendant 30 minutes, mais je m’attendrais à ce qu’un enfant de deux ans mange à table pendant 10 minutes.
  • Pour diminuer l’anxiété à table de votre enfant, un Time-timer (application gratuite) permet d’imager le temps pendant lequel on lui demande de rester à table.
  • Mangez tous à la même heure – repas en famille
  • Assurez-vous que la chaise est appropriée, que la position de l’enfant est supportée (tablette sous ses pieds, dos contre le dossier…)
  • Assurez-vous que vos ustensiles sont appropriés. Juste parce que c’est vendu pour enfant ne veut pas dire que les fabricants ont respecté des normes. J’interviens souvent sur le format des ustensiles, des cuillères tout spécialement. On les veut étroites et peu profondes. Regardez votre enfant manger. S’il doit ouvrir exagérément la bouche pour contourner l’ustensile et si ce dernier fait la largeur (ou plus) de sa langue, ce n’est pas approprié.

 

Marie-Emmanuelle Marchand, M.Sc., Orthophoniste

 

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